Dans le monde de la parentalité, faire face à la pression sociale peut être un défi de taille. Entre les attentes de la société, les conseils plus ou moins bienveillants de l’entourage et les comparaisons incessantes, les parents peuvent facilement se sentir submergés et perdre confiance en leurs capacités. Alors comment résister à la pression sociale avec assurance et dans le respect de l’autre ? Dans cet article, nous vous aidons à connaître vos propres limites et à trouver des moyens sains de réagir, pour préserver votre équilibre mental et familial. 

Influence sociale ou pression sociale ?

L’influence est normale chez les êtres humains : nous sommes des êtres sociaux. Nous baignons dans un environnement social commun, qui a inévitablement une influence sur nous : notre culture, nos croyances, notre histoire commune, notre fonctionnement collectif… C’est sous cette influence que nous construisons notre personnalité, et ce tout au long de notre vie. C’est ce que nous nommons pour les enfants la sociabilisation

L’influence sociale devient problématique quand elle est exercée sous contrainte et/ou de façon malveillante. Quand elle vient à l'encontre de nos besoins et de nos valeurs, l’influence sociale se transforme alors en pression sociale.

Pression sociale et parentalité

Dans le domaine de la parentalité, la pression sociale est omniprésente

En même temps que votre responsabilité de nouveau parent, est probablement arrivé un sentiment de vulnérabilité. Celui-ci peut parfois vous donner l’illusion que les autres ont un avis plus légitime que le vôtre concernant la relation avec votre enfant ou la réponse appropriée à ses besoins. Qui n’a jamais entendu cette fameuse remarque au moment où son bébé pleure : « Mais il a faim ce bébé ! » ou bien « Oh, il a des coliques ce bébé ! » ?

À force de subir encore et encore cette pression sociale, le risque est de perdre confiance en sa propre compétence parentale. Chaque recommandation peut alors être prise au pied de la lettre comme une injonction incontournable, quitte à laisser de côté son équilibre personnel. On cherche à se plier à ce que l’autre ou la société attend de nous, plutôt que de faire confiance à nos intuitions et d’écouter nos besoins. 

Notre charge mentale augmente en même temps que le nombre d’exigences pour être un « bon parent ». Notre parentalité se remplit d’obligations et se vide d’épanouissement, la frustration et la saturation risquent de s’installer et le plaisir d’être parent peut s’estomper. C’est à ce moment-là que la pression sociale peut entraîner une profonde souffrance, peut-être sous l’aspect d’un burn-out parental.

Comment résister à la pression sociale ?

Les types de réaction face à la pression 

Notre façon de réagir socialement est classée en 3 grandes catégories :

  • La réaction passive : on se met en retrait, on fuit la relation. Les interactions deviennent sources d'anxiété.
  • La réaction agressive : on adopte des comportements de défense et d'hostilité. En retour, on subit en général de l'opposition et du rejet. On rentre dans ce cas dans le cercle vicieux de l'agressivité.
  • La réaction affirmée : on réagit de façon ajustée à ses besoins et ses émotions, tout en respectant l’autre.

Savoir réagir de façon affirmée est une compétence essentielle qui permet de faire respecter ce que nous souhaitons et pensons. C’est ce que l’on nomme la capacité d’assertivité. Elle permet de s'exprimer et de défendre ses besoins, émotions, idées et droits de façon appropriée, en se respectant, sans empiéter sur ceux d'autrui.

Savoir faire preuve d’assertivité nous permet de pouvoir résister à la pression sociale, dans les cas où cette influence risquerait de porter atteinte à notre équilibre personnel.

Pour exercer votre capacité d’assertivité, le mieux est d’observer d’abord votre fonctionnement puis de vous entraîner à choisir volontairement d'accepter ou de refuser l'influence sociale.

Quelle influence a votre environnement social ? 

Commencez par identifier l’influence de votre environnement social sur vous : 

  • Qui a du poids pour vous ? Les autres parents ? Vos parents ? Les médias (groupes de discussion Facebook, influenceurs et influenceuses des réseaux sociaux, publicités, émissions de TV, comptes d’experts) ? Les professionnels de la petite enfance (sage-femme, pédiatre, puéricultrice, assistante maternelle, professionnelles de crèche, école) ?

  • Comment réagissez-vous quand quelqu’un remet en question ce que vous pensez ou faites ? Cela abîme-t-il votre confiance en vous ?

  • Diriez-vous que c’est facile ou difficile pour vous de prendre de la distance par rapport aux injonctions multiples autour de la parentalité ?

Quelle est votre réaction habituelle face à une situation déplaisante ? 

Détaillez ensuite votre tendance habituelle à réagir face à une situation qui vous déplaît :

  • Votre partenaire insiste pour que vous allaitiez votre bébé à naître alors que votre choix se porte sur le biberon.

  • Votre belle-mère vous dit de laisser pleurer un peu votre nouveau-né « pour qu’il se fasse les poumons » le temps de finir de manger votre dessert.

  • Votre grand-mère vous dit de poser votre nourrisson sur une couverture plutôt que de le porter comme vous le faites depuis le début du repas de famille.

  • Votre pédiatre vous préconise de démarrer la diversification alimentaire de votre nourrisson à 4 mois alors que vous n'êtes pas encore prêt·e.

  • Votre amie vous dit que votre façon de nourrir votre bébé n'est pas du tout adaptée à son âge et qu'il risque de devenir obèse.

  • Une professionnelle de la crèche vous assure que si votre bébé pleure autant au moment de la séparation le matin, c'est parce qu'il dort dans la même chambre que vous la nuit.

  • Votre assistante maternelle vous avance que pour corriger la malposition des pieds de votre enfant depuis qu'il commence à marcher, il suffit d'inverser ses chaussures entre la gauche et la droite.

  • La maîtresse de maternelle de votre enfant vous rend le soir les vêtements souillés par du pipi en vous disant que c'est inadmissible et que si cela continue, elle ne pourra plus l'accueillir en classe.

  • Votre enfant vous demande de jouer avec lui à un jeu que vous n'aimez pas.

  • Votre enfant vous demande de l'aide pour faire ses devoirs alors qu'il est 20h30 le dimanche soir.

  • Vous êtes fatigué·e et votre partenaire vous dit qu'il vient d'inviter des amis pour le dîner.

Apprendre à réagir de façon affirmée

Pour ces mêmes situations, entraînez-vous à réagir de façon affirmée en piochant dans ces exemples de techniques : 

  • Dire non fermement et calmement : « Non, j’entends ton insistance mais ma décision de l’allaiter au biberon est réfléchie et définitive. »

  • Trouver une excuse : « De toute façon, l’entendre pleurer m’a coupé l’appétit. »

  • Donner une raison : « Le début de la diversification alimentaire n’est pas compatible avec notre organisation familiale dans les prochains jours. Mais donnez-moi de la documentation si vous en avez, je serai ravie de lire sur le sujet ! »

  • S'extraire de la situation pour l'éviter : « Obèse ? J’en parlerai avec son médecin au prochain rendez-vous. »

  • Proposer une alternative : « Et si plutôt que de jouer avec les animaux, on jouait ensemble à un-deux-trois soleil ? »

  • Tourner la proposition en dérision : « Génial ! Fatiguée comme je suis après ma journée, je vais pouvoir me mettre les pieds sous la table pendant que tu gèreras le dîner ! »

D’où l’intérêt de connaître ses propres valeurs, émotions, besoins et limites : c’est une première étape essentielle avant de pouvoir les exprimer aux autres. Vous savez mieux que quiconque ce dont vous avez besoin, ce que vous vivez et la manière dont les événements retentissent sur vous. À vous de vous approprier chaque recommandation et de trouver un équilibre entre vos valeurs et les besoins de chaque membre de votre famille.

Gardez aussi en tête que sur des sujets aussi vastes que le sommeil, l’alimentation, la motricité ou l’éducation, aucun conseil ni recommandation n’est valable pour tout le monde et à chaque instant. Vous avez d’ailleurs dû remarquer que plusieurs injonctions se contredisent les unes par rapport aux autres… Il suffit de discuter d’un même sujet avec plusieurs parents pour le constater. C’est bien la preuve qu’elles ne sont pas si universelles que ça ! 

Clémentine Jaussaud
Médecin en crèche, spécialisée en accompagnement de la parentalité

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