Pour vivre en harmonie avec les autres, l’enfant doit apprendre à maîtriser les réactions déclenchées par la frustration. Mais qu’est-ce que la frustration du point de vue des neurosciences ? Pourquoi est-il si important d’apprendre à son enfant à la gérer ? Et quelle place donner à la frustration dans son éducation ?

Qu’est-ce que la frustration ?

Du point de vue des neurosciences, la frustration survient lorsque l’enfant souhaite vivement atteindre la récompense sans y parvenir (refus parental ou marche trop difficile à franchir).

La frustration se manifeste par des attitudes variées allant du découragement à la tempête émotionnelle. Elle s’oppose au système de récompense qui vient valoriser les efforts et augmenter la motivation à reproduire l’action.

Les neurosciences ont démontré que les enfants qui ont le mieux appris à gérer la frustration et à différer le plaisir obtiennent de meilleures performances scolaires et professionnelles, et ce en plusieurs aspects :

  • La frustration enseigne aux jeunes enfants la patience. Elle leur permet de comprendre que tout ne peut pas être obtenu instantanément et qu’il est parfois nécessaire d’attendre son tour ou de progresser vers un objectif.

  • La frustration encourage également le développement de la persévérance. Lorsqu’ils rencontrent des défis, ils apprennent à essayer encore et encore jusqu’à ce qu’ils réussissent. Cela favorise la résolution de problèmes et la résilience. 

  • Les interactions sociales peuvent souvent être sources de frustration, par exemple lorsqu’il s’agit de partager des jouets. Apprendre à résoudre ces conflits de manière constructive est une compétence importante pour le développement social et émotionnel de l’enfant, et de l’adulte qu’il deviendra.

Comment apprendre à son enfant à gérer la frustration ?

Le rôle de l’adulte

La frustration est omniprésente dans la vie de l’enfant : il aurait voulu autre chose pour son petit déjeuner, ne voulait pas aller à l’école aujourd’hui, s’est vu refuser un dessin animé ou un tour de manège, etc. Plus il est jeune, plus cette frustration lui est difficile à gérer.

L’exercer à faire face à la frustration est donc essentiel, d’abord pour les bénéfices évoqués précédemment, mais aussi parce que les tempêtes émotionnelles sont aussi éprouvantes pour l’enfant qui les vit que pour le parent qui les accompagne. 

On le sait, l’enfant jeune dispose d’une incroyable plasticité cérébrale : toutes les expériences qu’il vit fréquemment créent puis consolident des connexions dans son cerveau, qui seront ensuite mobilisées dans ses réactions futures.

Les adultes jouent donc un rôle crucial dans l’enseignement de la manière de gérer la frustration. Ils peuvent :

  • modéliser des comportements appropriés ;
  • offrir des encouragements et des stratégies de résolution des problèmes ;
  • créer un environnement soutenant pour l’enfant lorsqu’il fait face à la frustration.

Il est important de rappeler que la frustration excessive ou chronique crée un stress physique et psychologique intense. Elle peut nuire au développement des jeunes enfants. L’adulte doit donc adopter une posture soutenante auprès de son enfant.

Que faire concrètement ?

On recommande souvent aux parents d’exercer la frustration sur une formulation positive, de type « D’accord, mais d’abord ». Concrètement, cela signifie qu’avant d’être capable de faire face à un refus durable (« Non, nous n’irons pas au parc aujourd’hui »), il est important que votre enfant s’exerce à différer son plaisir.

  • Tout d’abord, placez l’enfant comme actif : « D’accord, mais d’abord je voudrais que tu… ». L’action associée au plaisir et à la récompense est différée le temps d’une action de l’enfant.

  • Puis laissez-le passif : « D’accord, mais d’abord j’ai besoin de … ». Il doit alors différer son plaisir et s’occuper seul en attendant, ce qui est autrement plus compliqué.

Tant que l’enfant est en difficulté pour comprendre et accepter que son plaisir est différé, il est très probable qu’il ne puisse pas gérer le refus sans être submergé par l’émotion, la déception et la colère.

À l’inverse, frustration et récompense cherchant à s’équilibrer sans cesse, il est bénéfique de féliciter l’enfant qui gère de mieux en mieux la frustration. On active ainsi le circuit de la récompense et de la motivation, réveillant en lui l’énergie positive nécessaire à se motiver plus encore, et à éteindre la frustration qu’il ressent.

Michèle Prados, infirmière puéricultrice

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