Dans toutes les cultures et toutes les religions, la présence du sang qui accompagne l’accouchement est vectrice de craintes et génératrice de tabous.
Le médecin accoucheur J. Duval, vivant de la fin du XVIe au début du XVIIe siècle, en parlait en ces termes :
« Le sang à la vérité est fort corrompu, comme étant le superflu excrémenteux et rebut que l’enfant enfermé dans le ventre de sa mère a refusé et délaissé comme inutile. Il acquiert une si mauvaise et vénéneuse qualité que les femmes sont à juste cause rejetées du Temple et des bains communs… »
Mais que se passe-t-il physiologiquement après l’accouchement ?
Après l’accouchement, la femme continue de saigner : ces écoulements sont appelés les « lochies », un mot dérivé du grec « lokhéia » (femme en couche) et « lokhos » (lit).
Tout de suite après la délivrance du placenta, l’utérus se rétracte et son volume diminue rapidement, ainsi que son poids. De 1,5 kg après l’accouchement, l’utérus reprend son poids normal de 50 g en quelques semaines.
Cette rétraction, rapide au début, ne sera totale qu’au bout de 2 mois. Le travail de rétraction provoque des contractions utérines (classiquement appelées tranchées). Celles-ci peuvent provoquer des douleurs, notamment au moment de l’allaitement.
L’endomètre (c’est-à-dire la paroi interne de l’utérus) évolue en 4 phases : régression, cicatrisation, régénération hormonale et reprise du cycle menstruel.
Les lochies
Les lochies sont un écoulement sérosanguin qui dure environ 4 à 6 semaines. Plus abondant au début (environ 8 jours), il diminue progressivement mais de façon variable : important certains jours et presque inexistant à d’autres moments. Mais attention, ce n’est pas forcément terminé et il ne faut pas se passer trop vite des protections hygiéniques !
D’abord de couleur rouge clair, les lochies deviennent ensuite rosées et enfin blanc jaunâtre (parfois un peu brunes). Elles contiennent du sang, du mucus et des débris de la membrane placentaire et de la paroi interne de l’utérus.
Pendant cette période, il est recommandé de porter des serviettes hygiéniques plutôt que des tampons, qui sont vecteurs d’infection. Portez si possible des serviettes en coton : en effet, elles irritent moins la région vulvaire et périnéale que celles contenant des matériaux synthétiques. Par ailleurs, l’utilisation d’un soin lavant spécifique pour cette partie du corps est recommandée.
Dans quels cas faut-il consulter ?
Si les douleurs persistent, si vous avez l’impression que vos pertes ont une odeur nauséabonde et/ou si vous vous sentez fiévreuse avec une température supérieure à 38,5°C, il faut consulter une sage-femme ou un médecin : ce sont les signes d’une possible infection.
Vous pouvez perdre quelques caillots de sang au début mais si les caillots deviennent volumineux (plus gros qu’un oeuf) ou si les saignements sont très abondants (une serviette saturée en 1 h), il est également nécessaire de consulter. Il reste peut-être un petit morceau de placenta qui n’a pas été évacué au moment de la délivrance, empêchant l’utérus de se contracter pleinement. Une échographie sera nécessaire pour identifier l’origine de ce saignement.
Les lochies constituent un milieu dans lequel les micro-organismes prolifèrent plus facilement que dans les sécrétions acides du vagin – ce qui expose facilement la femme à des infections. Ce risque infectieux est à l’origine des nombreuses infections maternelles qui firent tant de victimes avant l’ère des antibiotiques. Mais rassurez-vous, aujourd’hui les complications sont très rares.
La période du post-partum
Un certain nombre « d’interdits » pèsent sur les femmes pendant cette période : pas de relations sexuelles, peu de contacts avec les autres, isolement…
En réalité, c’est ce dont la femme qui vient d’accoucher a besoin pour pouvoir se retrouver, mettre son corps au repos et s’occuper de son bébé. Il s’agit d’une période de transformation, un passage de l’état de grossesse à celui d’une nouvelle page de sa vie : celle d’être une femme et une mère.
Une alimentation équilibrée ainsi que des compléments en vitamines mais surtout en minéraux vous aideront à récupérer au cours de cette période.
• Les suites de couches physiologiques – Comité Éditorial pédagogique de UVMaf – 2011
• Myles Textbook for midwives – Eleventh edition
• Cahiers de Maternologie – janvier-juin 1999 – n°12
Muriel ANDRÉ
Sage-femme libérale
Paris