La loi bioéthique du 2 août 2021 permet désormais un accès à l’assistance médicale à la procréation (PMA) pour toutes les femmes, qu’elles soient en couple ou non. Une femme célibataire peut donc maintenant accéder à la maternité en passant par une insémination, sans partir à l’étranger.
Au premier trimestre 2022, les études ont montré que les demandes des femmes célibataires étaient plus importantes dans les centres français que celles émanant des couples de femmes. La question se pose de savoir ce que vit une femme célibataire autour de son désir d’enfant, de la grossesse et de l’arrivée d’un bébé, sans coparent.
Anticiper l’absence du coparent
Il s’agit, très souvent, d’un choix longuement réfléchi. Les femmes envisageant d’être mamans solos se sont projetées autour de l’arrivée d’un bébé, se sont questionnées sur l’absence d’un coparent et ont réfléchi à des soutiens autour de la grossesse et du post-partum.
Parfois, certaines connaissent un désir d’enfant très ancien et expliquent ne pas avoir rencontré la personne leur permettant de mettre en place ce projet. Elles peuvent questionner alors le fait de privilégier la conception d’un bébé en l’absence d’un coparent, mais abordent très vite les tiers et les soutiens pensés dans la vie de cet enfant. Par conséquent, c’est souvent une grossesse portée par un groupe familial, amical ou social.
Contrairement aux femmes qui peuvent se séparer en cours de grossesse (et pour qui le fait d’avoir un enfant en solo n’était pas un choix), qui peuvent alors accumuler des facteurs de risque, les femmes célibataires sont généralement plus sereines pendant leur grossesse.
Cependant, des angoisses autour de l’arrivée du bébé peuvent apparaître et les pousser à repenser leur projet. En effet, avoir pensé à accueillir un bébé toute seule et le vivre concrètement sont bien évidemment deux choses différentes ! Les femmes peuvent donc très légitimement ressentir le poids de la responsabilité autour de l’accueil et de l’éducation de leur enfant, qu’elles portent seules.
Là encore, la possibilité d’être soutenue par les proches, mais aussi par les professionnels de santé (à commencer par ceux de la maternité), peut bien souvent aider efficacement les femmes dans ce projet d’enfant.
Apaiser les angoisses potentielles
Des inquiétudes autour du protocole d’insémination peuvent également apparaître, avec l’idée que cette grossesse tant attendue n’est pas encore certaine jusqu’à l’arrivée du bébé. Un stress peut donc survenir et, là encore, le fait de ne pas pouvoir le partager avec un compagnon ou une compagne peut attrister certaines mères.
Parfois, le désir d’enfant est tel qu’elles ne re-questionnent pas leur choix, mais elles peuvent néanmoins regretter que cette maternité ne soit pas « plus simple », « comme celle des autres » et que ce projet n’ait pas pu aboutir avec un ou une partenaire.
Certaines femmes prennent aussi conscience de leur plus grande vulnérabilité du fait de mener à bien ce projet seule. Il est fréquent qu’elles viennent questionner ce qui se passerait si elles venaient à être hospitalisées, transférées, voire à mourir. La mise en place du soutien d’un groupe et la désignation d’une personne de confiance peuvent aider à apaiser certaines angoisses.
Être accompagnée pour l’accouchement et le retour à la maison
Lorsqu’il s’agit de l’accouchement, la plupart des maternités ouvrent leurs portes à la personne que les femmes ont choisie pour les accompagner. Il s’agit alors pour elles d’être entourées à chaque étape de leur accouchement et de la naissance de leur enfant.
Le séjour en maternité peut parfois être adapté aux besoins de chaque patiente et de son bébé. Certains services n’hésitent pas à proposer un séjour prolongé ou la possibilité de confier le bébé en nurserie à certains moments de la nuit.
Au retour à domicile, le soutien à la mère et à l’enfant est primordial. Le rythme lié aux besoins d’un nouveau-né, le manque de sommeil, le fait de ne pas avoir de relais possible peuvent évidemment jouer sur l’humeur de la patiente. Rappelons-nous que le risque de dépression du post-partum est désormais connu et peut toucher toute femme venant d’accoucher. Il est donc important qu’un soutien familial, un relais amical ou une aide de la PMI puisse s’anticiper dès la grossesse afin que le retour à domicile se passe dans les meilleures conditions.
En parler à son enfant
Enfin, bien souvent, la future mère s’est projetée dès le désir d’enfant sur ce qu’elle souhaite ou non aborder de son parcours avec son enfant. Le fait de recourir à la PMA peut questionner certaines sur le fait d’aborder ou non la question du donneur. La coparentalité peut en inquiéter d’autres, qui ne se projettent pas sur une parentalité « en commun » sans être en couple.
Il s’agit donc de bien réfléchir à la technique souhaitée afin que ce parcours puisse se vivre le mieux possible pour la patiente, et donc pour son enfant. Cela nécessite que la femme soit déjà au clair avec ses propres choix, afin de pouvoir les évoquer.
Anticiper tous les questionnements avec des professionnels de santé, dès la grossesse, va être utile.
Lucille Cloarec, psychologue