Comment les accompagner ?

Les situations abordées dans cet article ne concernent qu’une faible minorité de femmes. Pour en savoir plus sur les autres cas de dépression post-partum, vous pouvez consulter les articles suivants : https://bonjourmalo.fr/blog/post-partum/.

L’arrivée d’un enfant est toujours un grand chamboulement dans la vie d’une femme. C’est un bouleversement à la fois physique et psychique, et tous les repères sont ébranlés. Rien d’étonnant donc à ce que les jeunes mères aient besoin d’un certain temps pour s’adapter à leur nouvelle vie. Mais parfois, des difficultés psychiques apparaissent : les femmes ont alors besoin d’aide pour les surmonter. Quelles sont les solutions proposées aux femmes confrontées à des troubles sévères en post-partum ?

Prévenir et repérer les difficultés psychiatriques

Les troubles psychiatriques peuvent être chroniques, par exemple dans le cas des addictions (alcoolisme, toxicomanie…). Mais il peut également s’agir de crises aiguës.

Souvent, il est possible de repérer en amont les patientes dites “à risque”. Certains événements survenant avant ou pendant la grossesse, ou encore au moment de la naissance, peuvent provoquer l’apparition de troubles psychiatriques graves en post-partum. C’est notamment le cas dans les situations suivantes :

  • antécédents personnels ou familiaux de troubles psychiatriques ;
  • abandon par le conjoint pendant la grossesse ;
  • décès d’un des parents pendant la grossesse ;
  • conditions psychologiques difficiles pendant la grossesse (conflits conjugaux ou solitude par exemple) ;
  • accouchement traumatique ;
  • pathologie du nouveau-né à la naissance ;
  • décès du bébé in utero ou à la naissance.

D’une manière générale, les mineures ayant des addictions, des troubles du comportement alimentaire, victimes de violences et/ou vivant un déni de grossesse ont également plus de risques de rencontrer des difficultés psychiatriques graves à la naissance de leur enfant.

Mais parfois, ces difficultés apparaissent de manière totalement imprévisible. C’est entre autres le cas de la “psychose puerpérale”, heureusement très rare (environ 1 naissance sur 1 000). Il s’agit d’une rupture psychique grave, voire d’une schizophrénie aiguë. Il faut alors prendre des décisions de manière urgente, soit en hospitalisant d’office la mère et en plaçant temporairement l’enfant, soit en accueillant les deux en unité mère-enfant.

Ces complications psychiatriques ne sont pas à prendre à la légère. Les études statistiques sur les causes de mortalité maternelle périnatale font apparaître que pour les jeunes mères, le principal risque de mortalité est le suicide (à égalité avec les pathologies cardiovasculaires). Même s’il s’agit d’une éventualité extrêmement rare (50 décès sur environ 750 000 naissances), il s’agit toujours de terribles drames humains. Dans les cas les plus graves, il ne faut pas négliger non plus le risque d’infanticide. Il y a donc urgence à trouver des solutions pour accueillir et soigner les femmes atteintes de ce type de pathologies, mais aussi à améliorer leur prévention et leur repérage.

Les solutions mises en place en Île-de-France

Les projets territoriaux de santé mentale (PTSM)

Dans chaque région, l’Agence régionale de santé (ARS) met en œuvre la politique régionale de santé en coordination avec les différents partenaires. Le décret du 28 juillet 2020 prévoit de mettre en place un certain nombre de projets territoriaux de santé mentale, et en particulier de santé mentale périnatale. Il existe 9 PTSM en Île-de-France, pour lesquels 9 priorités ont été proposées.

L’une d’entre elles prévoit l’hospitalisation conjointe de la mère et de l’enfant dans le cas de problèmes psychiatriques graves. Dans chaque département, il existe des hôpitaux psychiatriques intersecteurs. Une unité mère-enfant sera donc mise en place dans chaque intersecteur de psychiatrie, soit en hospitalisation complète, soit en ambulatoire (c’est-à-dire sans hébergement).

Des lieux de soutien et de guidance à la parentalité existent déjà de longue date. Il s’agit de lieux de parole et d’écoute, tels que les PMI (Protection Maternelle et Infantile) ou les LAEP (Lieux d’Accueil Enfants-Parents). Les professionnels présents sur place observent les interactions avec l’enfant et sont formés pour accompagner, guider et conseiller les jeunes parents.

Les réseaux de périnatalité, déjà existants, seront encore développés. Cette organisation permet notamment aux psychologues des maternités de faire appel aux réseaux (par exemple à la PMI) pour prendre en charge une patiente.

L’objectif est aussi d’augmenter l’offre de soin en hôpital de jour. Dans le cas d’un trouble de la relation parent-bébé, le parent et son enfant pourront passer plusieurs journées de suite avec des professionnels formés qui les prendront en charge.

Toutes ces priorités ne sont pas encore mises en œuvre à l’heure actuelle, mais certains projets sont bien avancés.

Les projets déjà en place en région parisienne

En Île-de-France, d’autres projets sont déjà instaurés :

  • À Paris, l’équipe mobile de l’hôpital Robert Debré (20e arrondissement) assure le repérage et la prise en charge précoce des difficultés psychiatriques.
  • Dans les Hauts-de-Seine (92), un réseau de périnatalité a été mis en place.
  • Dans l’Essonne (91), un centre de référence en périnatalité a été créé.
  • Dans le Val-de-Marne (94), il existe un dispositif de psychiatrie périnatale disposant d’une unité mobile et proposant également des téléconsultations.
  • Dans les Yvelines (78), il existe un dispositif de consultation mobile spécialisée en psychiatrie périnatale.

On peut donc constater que l’ARS d’Île-de-France s’empare du problème et prend un certain nombre d’initiatives. Mais qu’en est-il dans les autres régions françaises ? Il appartient à chaque Agence régionale de santé de prendre des décisions et d’harmoniser les différents projets les uns avec les autres.

Un exemple de dispositif dans les Hauts-de-Seine

Deux maternités du département des Hauts-de-Seine ont créé un service mobile d’urgence de psychiatrie. Il s’agit de l’hôpital Béclère (Clamart) et du Centre Hospitalier des Quatre Villes (Saint-Cloud).

Suite à un signalement de l’hôpital, les équipes de ce service mobile se rendent à la maternité ou au domicile pour rencontrer les femmes ayant des difficultés psychiatriques. Il peut alors y avoir une hospitalisation de la mère, avec ou sans son enfant.

À Colombes, l’hôpital Louis-Mourier s’est organisé pour recevoir la mère et son bébé en psychiatrie. Mais les places sont limitées et sont surtout prévues pour les femmes déjà connues en pré-partum. Pour les autres, les psychologues doivent donc encore chercher des places dans d’autres structures.

Les solutions mises en place à l’étranger

Au Canada, certaines femmes souffrant d’une dépression post-partum sévère peuvent être suivies chez elles en ambulatoire par une “unité mobile de psychiatrie périnatale”. Il faut bien sûr que le contexte s’y prête : la bienveillance et la coopération de l’entourage sont alors essentielles. Cette prise en charge à domicile est initiée par l’hôpital et peut durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois. La jeune mère est suivie par une infirmière, un psychologue et/ou un psychiatre.

En Angleterre, la NHS (service national de santé) a listé les risques statistiques et établi que 2 naissances sur 1 000 se compliquent par des situations psychiatriques à haut risque. Pour 10 000 naissances, il y a donc 3 lits de soins d’hospitalisation mère-enfant. Les femmes concernées entament un traitement et peuvent ensuite rentrer chez elles avec un suivi d’unité mobile ou en ambulatoire.

Pour les pathologies psychiatriques graves (30 naissances sur 1 000), des unités mobiles spécialisées ont été créées, à raison d’une équipe pour 10 000 naissances. Les pathologies psychiatriques modérées, quant à elles, concernent 10 % des naissances. Des sages-femmes spécialisées, ayant bénéficié d’une formation approfondie, peuvent alors se déplacer avec des psychologues ou des infirmières psychiatriques.

Ces dispositifs de soins, instaurés depuis longtemps en Angleterre, ont servi de modèle pour un certain nombre de projets en France.

L’apparition de troubles psychiatriques graves en post-partum doit absolument être accompagnée. Pour la jeune mère, il est indispensable d’être prise en charge par des professionnels. Des solutions existent pour sortir de cette situation et aider la mère à guérir. Lorsque cela est possible, il est important de repérer les facteurs de risques au cours de la grossesse et éventuellement de proposer une prise en charge en amont de l’accouchement. Il est donc nécessaire de créer plus de lieux de soins spécifiques, mais aussi de former davantage les professionnels en périnatalité. En 2022, le repérage et l’accompagnement de la dépression du post-partum va d’ailleurs devenir une priorité du gouvernement.

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