Une mécanique de précision

L’endormissement et le rythme veille-sommeil sont sous la dépendance de deux mécanismes qui se conjuguent harmonieusement.

Le rythme circadien

Le premier mécanisme est le rythme circadien. Nous possédons une « horloge interne » qui, même indépendamment de la lumière du jour, nous guide vers le sommeil.

Spontanément, comme l’ont démontré des expériences d’isolement temporel (notamment par le spéléologue Michel Siffre), ce rythme circadien s’établit un peu au-delà de 24 heures. Ce qui veut dire que quotidiennement, notre horloge interne doit être remise à l’heure pour que notre heure de coucher ne se décale pas jour après jour.

Nous avons deux synchroniseurs qui vont permettre cette « mise à l’heure » quotidienne :

  • L’alternance jour/nuit. Nous possédons une minuscule glande dans le cerveau qui produit la mélatonine (hormone du sommeil). C’est cette mélatonine, dont la production est intimement liée à l’intensité lumineuse, qui va réguler notre horloge interne. Plus la luminosité est forte, moins le cerveau produit de mélatonine. Son taux sera donc le plus élevé au milieu de la nuit, ce qui explique qu’il soit si pénible de se réveiller entre 2 et 4 heures du matin… Quant à la lumière du jour, elle invite au réveil – c’est pourquoi se réveiller tôt en été est bien moins difficile qu’en hiver. La mélatonine est une substance qui invite au sommeil et son ennemie est la lumière. Les tablettes, smartphones et à degré moindre, la télévision, du fait de la puissante lumière bleue qu’ils produisent, s’opposent donc à l’entrée en sommeil. C’est pourquoi leur usage est déconseillé dans les deux heures qui précèdent le coucher.

  • Les activités sociales. Lorsque l’on vit à plusieurs, que l’on a des activités professionnelles dans un bureau, que l’on prend ses repas en même temps que les autres, le rythme du groupe s’impose peu à peu à toutes et à tous par « synchronisation » de nos horloges internes. D’autre part, deux personnes qui vivent ensemble acquièrent, à la longue, un rythme commun – même si au départ l’un était couche-tôt et l’autre un oiseau de nuit !

Les substances chimiques ralentissant les systèmes d’éveil

L’autre mécanisme est l’accumulation de substances chimiques qui ralentissent les systèmes d’éveil. Ces substances sont des protéines (adénosine) qui s’accumulent dans l’organisme au fur et à mesure que la période d’éveil s’allonge. La somnolence va progressivement s’installer, jusqu’au sommeil. Ce mécanisme se nomme « la pression de sommeil ».

À noter que la caféine, contenue dans le café et à moindre taux dans le thé, s’oppose à l’effet de l’adénosine et empêche donc de s’endormir.

Par ailleurs, il ne faut pas du tout sous-estimer les facteurs génétiques qui font que nous sommes « du matin » ou « du soir ». Certaines personnes sont fraîches et disposes dès 6 heures du matin – mais généralement, c’est parce qu’elles se couchent tôt. D’autres au contraire ne parviennent jamais à s’endormir avant minuit ou 1 heure, et souffrent si elles ont à se lever avant 8 ou 9 heures…

L’endormissement répond à des mécanismes chimiques complexes : pour s’endormir, il faut mettre au repos les systèmes qui commandent l’éveil et activer les systèmes de sommeil.

De nombreux neuromédiateurs sont mis en jeu pour obtenir cet équilibre veille/sommeil : la noradrénaline, le cortisol, la dopamine, la sérotonine, le GABA… Tous ces neuromédiateurs sont sensibles au stress, à certaines médications, à la caféine, etc. On comprend dès lors à quel point cette mécanique de précision est fragile, facile à dérégler et sensible aux habitudes et aux comportements que nous adoptons.

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