Quelle est l’origine de la charge mentale et quelles sont ses conséquences sur le désir ?

Comprendre la charge mentale

Pour comprendre la charge mentale ou la surcharge cognitive, il est essentiel d’avoir en tête deux concepts importants de notre architecture cognitive : la mémoire de travail et le capital d’attention.

La mémoire de travail

Commençons par la mémoire de travail, qui est essentielle dans nos processus cognitifs. La mémoire de travail est une forme de mémoire à court terme qui permet de stocker et de manipuler des informations pendant une courte durée (quelques secondes) en vue de les utiliser pour accomplir une tâche. Pour retenir quelque chose de manière temporaire, nous devons donc entretenir une boucle dans notre cerveau — mais le nombre d’éléments que l’on peut restituer immédiatement est limité (entre 5 et 9).

La surcharge cognitive arrive quand on a saturé notre mémoire de travail. Les conséquences de cette surcharge sont alors multiples :

  • difficultés à se concentrer ;
  • sentiment de ne plus rien contrôler ;
  • incapacité à déclencher des raisonnements complexes ;
  • tendance à la procrastination et à l’oubli.

Le capital d’attention

L’autre notion essentielle est le capital d’attention. Nous vivons en pleine « guerre » de l’attention, tout est fait pour la capter. Pour information, chaque jour, nos yeux voient en moyenne 1 200 messages publicitaires. Cela peut donc nous distraire et perturber notre mémoire de travail — il devient alors vital de la protéger. Pour ce faire, voici deux techniques :

  1. Apprendre à gérer correctement notre capital d’attention, en ayant par exemple une attention plus sélective.
  2. Disposer d’un système d’organisation personnelle qui nous permet de décharger notre mémoire de travail de la surabondance d’informations.

Sauf que, et c’est là que le bât blesse, de nombreuses personnes vont décharger leur mémoire de travail sur quelqu’un d’autre avec le fameux réflexe : « Au fait, peux-tu me faire penser à faire ceci ou cela ? ».

C’est alors que l’on voit apparaître la fameuse charge mentale : dans un couple, l’un des partenaires va avoir tendance, pour préserver sa mémoire de travail, à saturer (de façon inconsciente bien sûr) celle de l’autre.

Quel est le lien avec le désir ?

Avant d’aborder la question de la charge mentale, une petite explication sur le désir est nécessaire.

Le désir est un mécanisme qui fonctionne avec une double commande : une pédale d’accélération et une pédale de frein.

  • La pédale de frein va être actionnée par l’ensemble des croyances autour de la sexualité, par l’éducation, par la peur, par le stress et les tracas de la vie quotidienne.
  • La pédale d’accélération va être stimulée grâce aux désirs, aux plaisirs, aux fantasmes et au temps pris pour soi.

Quand on a une baisse de désir, finalement, il s’agit bien souvent d’un déséquilibre de ces deux commandes contraires.

Pour que le désir puisse exister, il faut que l’on puisse lui faire de la place. Lorsque l’on subit cette charge mentale avec cette surcharge cognitive, on ne peut physiquement (et psychologiquement) pas laisser de la place au désir. Dès lors, la sexualité va être perçue comme une chose supplémentaire à penser.

J’ai un souvenir très marquant d’une personne qui m’a dit en consultation : « Moi, je passe après la panière de linge sale. Je vois ma sexualité comme une énième chose à faire après avoir fait ma journée de travail / pris les transports / fait les courses / pris soin des enfants / fait à manger / préparé les affaires pour le lendemain… Si je dois prendre du plaisir pour moi, ça va être un peu compliqué et je n’en ai plus la force ni l’envie ».

Alors comment faire pour laisser de la place au désir ?

S’octroyer du temps pour soi

Avant d’être en mesure de désirer l’autre, il faut être capable de se désirer soi. Un des premiers exercices serait de s’obliger, une fois par semaine pendant 30 minutes minimum (mais cela peut être plus), à prendre du temps pour soi : aller marcher, faire du sport, faire un soin, lire, écouter quelque chose, voir une exposition…

Pouvoir disposer de cette fenêtre, aussi courte soit-elle mais régulière, va vous permettre de prendre soin de vous-même. Quand on ne prend pas soin de soi, on n’a pas envie de prendre soin de l’autre et d’être dans une relation de partage, d’échange et d’abandon — ce qu’est l’érotisme.

Déléguer au maximum

Dans la mesure du possible, essayez de déléguer au maximum les petites choses du quotidien. Si par exemple vous faites des courses le samedi matin, préférez un « drive » ou faites-vous livrer si vous habitez en ville. Cela ne sera pas plus cher et vous économiserez un temps précieux, ce qui pourra vous permettre de prendre soin de vous.

Être dans « l’ici et maintenant »

À cause des « to do list » à rallonge, nous sommes trop souvent dans l’après et plus assez dans le présent. Essayez, si possible, de vivre les choses en pleine conscience et dans l’instant.

Si vous prenez une douche en pleine conscience, faites couler l’eau, fermez les yeux, écoutez le bruit de l’eau qui coule, ressentez l’odeur du gel douche, la texture du savon, la chaleur qui vous enveloppe, le contact de l’eau sur votre peau… Vivez le moment présent !

Margaux Terrou, sexologue clinicienne

Publications similaires