L’émotion se définit comme la réaction physique d’un individu face à un élément déclencheur. Ce n’est ni une sensation, ni un sentiment. Dès lors, on comprend que gérer ses émotions revient à inhiber la réaction que suscite la situation. Cela nécessite une bonne dose d’auto-contrôle, d’expérience et d’apprentissages, et cette fonction ne sera totalement mature qu’à l’âge adulte (et encore… pas chez tout le monde !).

Mais d’ici là, nous pouvons ensemble comprendre le rôle des émotions et aider nos enfants à développer leurs compétences émotionnelles.

Le rôle des émotions

Qu’elles soient agréables ou non, les émotions jouent un rôle essentiel dans notre adaptation et notre survie. Certaines préparent notre organisme à lutter ou courir, d’autres améliorent notre capacité à nous remémorer des événements importants pour y réfléchir à nouveau, ou guident nos interactions avec autrui.

En effet, lorsque je vis une émotion, non seulement cette émotion m’envoie un message – et je vais agir en tenant compte de celle-ci – mais elle est aussi perçue par autrui, qui agit en tenant compte de celle-ci. On peut donc dire que les émotions sont un vecteur de communication et influencent les comportements sociaux.

L’expression, le décodage, puis la gestion de ses émotions et de celles d’autrui sont donc intrinsèquement liés au développement social du tout-petit, qui commence déjà in utero.

Les deux types d’émotions

On distingue deux types d’émotions : les émotions primaires et les émotions morales.

Les émotions primaires

Les émotions primaires sont universellement reconnues, dans toutes les cultures du monde, par une expression faciale spécifique. Dès la naissance, le bébé est d’ailleurs capable de discriminer des visages émotionnels très contrastés, comme la joie et la colère.

C’est parce que nous l’avons inconsciemment remarqué que nous avons tendance à « bébéiser », c’est-à-dire à accentuer nos mimiques lorsque nous nous adressons au tout-petit. S’il ne comprend pas le sens des mots, il comprend en revanche l’intention que nous y plaçons et perçoit donc notre état émotionnel. À 6 mois, il est capable de discriminer les 6 émotions primaires : joie, colère, tristesse, peur, surprise, dégoût.

Les émotions morales

Les émotions morales sont, elles, intrinsèquement liées à la culture et aux normes de la société dans laquelle s’inscrit l’enfant. Empathie, gratitude, honte, fierté, culpabilité, mépris, compassion… Elles s’installent à partir de 18 mois-2 ans, grâce à la conscience de soi d’une part, et la conscience des règles et des normes (ce qui permettra de distinguer ce qui est bien ou mal) d’autre part.

En conséquence, on se rend compte qu’envoyer réfléchir un bambin parce qu’il a mordu n’a aucun sens ! À l’inverse, expliquer à l’enfant le comportement attendu de lui dans telle situation et la façon de réparer son mauvais choix de comportement apporte des effets positifs, qui construisent sa capacité à comprendre et à développer les émotions morales.

Reconnaître différents états émotionnels

Progressivement, entre 1 et 8 ans et suivant les étapes de son développement cognitif, l’enfant devient capable de reconnaître chez lui, puis chez l’autre, des états émotionnels différents.

Pendant cette période, nous observons que l’environnement social dans lequel grandit l’enfant a une grande influence :

  • Parler de ce que l’enfant vit, de ce que nous observons de ses comportements, de ce qui nous montre qu’il est en colère, qu’il a du chagrin ou qu’il est heureux, lui permet d’identifier petit à petit ses émotions.

  • Parler de vos propres émotions (ou de celles d’un personnage dans une histoire lue) et de ce qui les occasionne permet à l’enfant de mieux comprendre l’émotion.

  • Pendant les jeux, s’imaginer successivement dans la peau des différents personnages qui composent la scène lui permet de comprendre qu’ils la perçoivent différemment, bien qu’ils la vivent ensemble.

  • Développer les jeux de société type jeux de coopération, qui supposent de prendre en compte le point de vue de l’autre, permet à l’enfant de comprendre que ses camarades peuvent avoir une pensée différente de la sienne, alors même qu’ils se livrent à la même activité que lui.

  • Soyez l’adulte que vous aimeriez qu’il devienne : chacun, adulte comme enfant, traverse des tempêtes émotionnelles. Elles sont déjà bien difficiles à réguler pour l’adulte, mais c’est quasi impossible pour l’enfant. Essayez de penser à ce qui vous aide dans ces moments-là (prendre l’air, écouter de la musique, être pris·e dans les bras…) et imaginez quelle attitude vous pourriez adopter pour transmettre le calme à votre enfant.

  • Comme tout apprentissage, il faudra de la répétition, des essais, des erreurs, des réajustements… Tout cela fait partie du mécanisme d’apprentissage qui conduit à la compétence. C’est vrai pour les tables de multiplication, c’est aussi vrai dans l’apprentissage de la régulation émotionnelle.

    Michèle Prados, infirmière puéricultrice

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