Cet article reprend des notions abordées dans un précédent article sur les préliminaires, les deux thématiques étant relativement proches.

« On ne fait pas beaucoup l’amour, pour être honnête… » (phrase prononcée en consultation)

Mais qu’est-ce faire l’amour selon vous ? Vous êtes-vous déjà demandé ce que faire l’amour signifie ?

Petit exercice à faire en solo ou en duo :

1. Commencez une carte heuristique (également appelée carte mentale, ou « mindmap » en anglais) en écrivant au centre de la page « Faire l’amour ».

2. Laissez aller votre imagination et inscrivez tous les mots qui vous viennent à l’esprit. Cela peut aussi être le titre d’une chanson, le nom d’un tableau… Ne vous censurez pas !

3. Enfin, regardez votre œuvre et analysez-la : le triptyque baiser / « préliminaires » / pénétration est-il présent ?

En consultation, la pénétration est systématiquement évoquée — mais faire l’amour est un peu plus complexe que cela.

Comprendre le script érotique

Qui a dit que faire l’amour était uniquement lié à la pénétration ? Quid des personnes ne la pratiquant pas ? Quid des personnes n’ayant pas de pénis ? Cela veut-il dire que les lesbiennes ne font jamais l’amour ? Est-ce que la pénétration anale en fait partie ? Et le reste alors ?

Dans son livre « Apprendre à faire l’amour », Alexandre Lacroix, directeur de la rédaction de Philosophie Magazine, vient apporter une teinte philosophique aux traditionnelles conversations autour de la sexualité. Dans un chapitre intitulé « Sur les préliminaires », on apprend la chose suivante : Freud est l’inventeur du concept des préliminaires. Il les mentionne pour la première fois dans son ouvrage « Trois essais sur la théorie sexuelle » (1905). Oui mais… il ne fait pas que les nommer : il va plus loin et établit le script érotique que l’on connaît actuellement (le fameux triptyque). Ce concept a 120 ans.

Ces travaux ont tellement influencé notre gestuelle érotique et sexuelle (préliminaires / pénétration / orgasme) qu’Alexandre Lacroix parle de « Script Freud Porn ». D’ailleurs, l’approche est uniquement hétérosexuelle et le plaisir est avant tout orienté sur l’orgasme masculin…

Reconsidérer l’acte sexuel

Aujourd’hui, nous reproduisons bien souvent cette gestuelle érotique de façon mécanique, machinale, sans finalement nous demander si elle nous convient vraiment.

Et le plus dramatique dans tout cela, c’est que nous ne l’adaptons pas en fonction de nos âges, de nos envies du moment, d’éventuelles maladies… bref, des périodes de vie que nous vivons. Nous tenons coûte que coûte à ces pratiques. Au nom de quoi ? Au nom d’une prétendue normalité sexuelle ? À quel moment quelqu’un aurait-il décidé que nous ne pouvions pas chambouler les codes ?

Alors, faites-vous ce cadeau et laissez-vous guider par vos envies. Vous voulez commencer par du sexe oral, enchaîner par une pénétration et repasser sur une pratique digitale ? D’accord ! Vous voulez seulement vous lover contre votre partenaire et vous arrêter là ? C’est bien aussi.

Faire l’Amour

Pourquoi « Amour » avec une majuscule ? Selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, une majuscule est par définition « plus grande et d’une forme particulière par rapport aux autres lettres ».

Faire l’Amour n’est pas anodin. Que ce soit pour une nuit, pour une semaine ou pour la vie, il est temps de redonner ses lettres de noblesse à ce mot. Faire l’Amour est un cadeau que l’on se fait à soi et ensuite à l’autre. Ce cadeau, c’est celui d’ouvrir les portes de son intimité et de partager un moment de plaisir à deux (ou plus), avec tout ce que l’on souhaite mettre derrière le mot « plaisir ».

Il n’y a pas une seule façon de faire l’amour, tout comme il n’y a pas une seule façon d’aimer.

Margaux Terrou, sexologue clinicienne

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