Le perfectionnisme peut être une qualité précieuse : il nous permet d’avoir l’élan pour nous améliorer jour après jour et devenir la meilleure version de nous-même. Mais parfois, un tempérament trop perfectionniste et des idéaux inatteignables peuvent entraîner un hyper-investissement dans la parentalité, avec un désir de performance sur tous les fronts. Dans ce cas précis, le perfectionnisme parental est l’un des ingrédients pouvant mener jusqu’au burn-out — et aux sentiments d’échec et de honte de ne pas avoir « réussi » sa parentalité. Cela risque alors d’avoir un impact négatif sur le bien-être et le développement des enfants. Alors comment éviter d’aller trop loin dans le perfectionnisme parental ?
Le perfectionnisme parental, on en parle ?
Qu’est-ce que le perfectionnisme parental ?
Le perfectionnisme parental n’est pas une maladie : c’est l’idée que les parents doivent tout faire de manière irréprochable. Ils se fixent des standards extrêmement élevés pour eux-mêmes et leurs enfants, se concentrant sur la performance et tolérant peu l’échec. Cela implique généralement un contrôle strict des activités des enfants et une auto-critique intense, générant beaucoup de stress et de culpabilité chez les parents, et créant un sentiment d’inadéquation et d’anxiété chez les jeunes enfants.
D’où vient cette image du parent idéal ?
- Du « parent parfait » des réseaux sociaux et de l’image que renvoient parfois les autres familles de notre entourage : c’est la pression sociale. Nous avons naturellement tendance à nous comparer à ce que les autres donnent à voir. Il est apaisant de garder en tête que chacun ne montre que ce qu’il veut bien montrer et qu’on ne connaît jamais « l’envers du décor » ! D’ailleurs vous aussi, lorsque vous postez une photo sur les réseaux sociaux, vous prenez le meilleur angle de vue — en prenant soin de ne pas sélectionner la scène sur laquelle on voit votre maison en désordre ou votre enfant qui pleure parce que son gâteau est cassé.
- De l’image du parent que chacun aurait imaginé devenir. Chaque parent l’a en tête, et c’est surtout après celui-là que chacun court en vain. Parfois, certains standards qui paraissent simples sont exagérément élevés dans notre situation personnelle : vouloir être un parent zen alors que l’on est de nature très active et anxieuse, par exemple. Notre attitude peut aussi se construire en réaction à ce que nous avons connu étant enfant (soit en miroir, soit à l’opposé) : vouloir une famille nombreuse quand on a été enfant unique, du temps de proximité et de câlins quand on en a manqué, etc. C’est cet écart entre l’imaginaire et le réel qui est parfois très difficile à vivre.
- Du parent parfait que la société semble « attendre » que nous soyons et des efforts qu’il nous semble indispensable de fournir pour ne pas être jugés négativement.
Identifier les signes du perfectionnisme parental
Les signes de perfectionnisme chez les parents
La plupart des parents perfectionnistes ont des attentes irréalistes vis-à-vis d’eux-mêmes. Les exemples ne manquent pas : cuisiner toujours bio, interdire systématiquement les écrans, proposer quotidiennement des loisirs créatifs… Ils s’efforcent de tout faire parfaitement bien.
Le perfectionnisme parental peut aussi se manifester par le fait d’en demander trop à ses enfants. Certains parents attendent d’eux qu’ils soient performants dans tous les domaines : école, activités sportives ou artistiques, etc. Ils ont donc tendance à ne voir que les échecs ou les points à améliorer et à critiquer fréquemment les performances de leurs enfants, en oubliant d’encourager leurs efforts et de féliciter leurs succès.
Enfin, les parents perfectionnistes peuvent avoir du mal à déléguer certaines tâches à leurs enfants, par peur qu’elles ne soient pas effectuées correctement. Cette tendance nuit au développement de l’autonomie, pourtant essentiel dès le plus jeune âge.
Les comportements observables chez les enfants
Les enfants de parents perfectionnistes ont tendance à chercher une validation constante, devenant dépendants des louanges pour se sentir valorisés. Ils peuvent développer une peur intense de l’échec et un manque de confiance en eux, en évitant les risques et étant très critiques envers eux-mêmes.
Ces enfants présentent souvent des signes physiques d’anxiété, comme des maux de tête ou des troubles du sommeil, en réponse au stress constant. Enfin, ils peuvent imiter et adopter des comportements perfectionnistes, essayant de tout faire parfaitement et se fixant des standards irréalistes, ce qui se manifeste dans leurs travaux scolaires et activités sociales.
Les conséquences du perfectionnisme parental
Le risque d’épuisement parental
Le perfectionnisme augmente les risques de burn-out parental, caractérisé par un sentiment d’épuisement et de saturation dans le rôle de parent.
En se soumettant à une pression intense, les parents concernés consacrent un temps et une énergie considérables à la recherche de la perfection. C’est le cas de certains parents (surtout les mères) engagés dans une démarche de parentalité positive et bienveillante. Cela les amène bien souvent à négliger leurs propres besoins et à sacrifier leur bien-être, provoquant un état d’épuisement physique et émotionnel. C’est un cercle vicieux : ils sont insatisfaits de leurs performances et éprouvent un sentiment de culpabilité intense, augmentant ainsi leurs niveaux de stress et de fatigue, ce qui les rend encore moins performants… La santé mentale des parents est donc compromise et cela impacte toute la dynamique familiale.
Les conséquences sur l’enfant
Quelle que soit la façon dont s’exprime le perfectionnisme parental, il peut avoir des effets néfastes sur le parent comme sur l’enfant.
Tout d’abord, le fait d’imposer des attentes irréalistes et de soumettre toute la famille à une pression constante crée un climat de stress et d’anxiété. Cela peut avoir de lourdes conséquences sur l’estime de soi des enfants, les faisant douter de leurs propres capacités.
Le fait de percevoir un manque de reconnaissance et d’acceptation de la part de leurs parents conduit à une frustration mutuelle. La relation parent-enfant et l’environnement familial peuvent alors être impactés, empêchant le développement équilibré des enfants.
Les stratégies pour se défaire du perfectionnisme
Établir des attentes réalistes
Pour se défaire de cette pression écrasante et réduire cet excès de perfectionnisme, plusieurs pistes sont possibles :
- Définir des attentes atteignables pour les enfants et pour soi-même en tant que parent.
- Se fixer des objectifs réalistes en fonction de son histoire et de son état, travailler sur soi pour mieux connaître ses limites et augmenter sa confiance en soi.
- Revoir l’image de son idéal parental et parvenir à se dégager de certaines aspirations.
- Garder en tête son idéal comme un phare au loin, vers lequel on se dirige quand on doute de la direction à prendre, tout en sachant qu’on ne l’atteindra jamais. Le concept d’un idéal étant de « tendre vers », mais nullement d’y arriver.
Encourager l’autonomie de l’enfant
Un contrôle permanent et excessif des parents laisse trop peu d’espace aux enfants pour explorer, s’exprimer et apprendre par eux-mêmes. Or, pour se développer et construire sa confiance en soi, un enfant doit bénéficier d’une certaine liberté d’action. En lui confiant des responsabilités, vous lui permettrez d’apprendre petit à petit à faire ses propres choix. Il gagnera ainsi en autonomie et sera capable de faire de plus en plus de choses par lui-même.
Cependant, n’oubliez pas que la maîtrise d’une compétence passe par l’expérimentation — et donc nécessairement par des erreurs. C’est pourquoi les tâches confiées à votre enfant doivent être adaptées à son âge. Vous devrez probablement vous entraîner à lâcher prise et à accepter que les choses ne soient pas faites exactement comme vous l’auriez souhaité !
Développer sa propre intelligence émotionnelle
Pour réduire le stress lié au perfectionnisme et mieux gérer ses propres attentes, il est nécessaire d’améliorer son intelligence émotionnelle et de faire preuve d’indulgence envers soi-même.
- Adopter un regard confiant sur soi : observez avec douceur et gentillesse les principes que vous aviez avant de devenir parent et sur lesquels vous avez dû revoir vos attentes pour diminuer votre pression interne. Par exemple le fait de cuisiner tous ses repas maison, de n’acheter que des jouets en bois ou de faire du cododo pendant 6 mois minimum…
- Diminuer son auto-critique en situation d’échec : laissez revenir à votre souvenir la dernière fois que vous avez jugé votre comportement comme inadéquat (la dernière fois que vous avez dû crier par exemple). Parvenez-vous à lister quel besoin n’était pas respecté ? Votre besoin de calme, votre besoin d’ordre, votre besoin de coopération ? De quelle ressource auriez-vous eu besoin pour rééquilibrer votre état ? Exercez-vous à vous parler comme vous le feriez à un·e ami·e, avec un regard positif et accueillant, avec du respect pour les difficultés ressenties et de la tolérance pour les erreurs.
- Stimuler « l’autocompassion » : souriez-vous à vous-même, même un sourire forcé ! Cela libère des endorphines, qui mettent le cerveau dans un état de détente.
Et surtout, rappelez-vous : à l’impossible nul n’est tenu, car aucun parent n’est parfait ! D’ailleurs, pour un enfant, il est préférable de constater que son parent n’est pas parfait — car dans le cas contraire, il aurait une énorme pression sur ses épaules.
Le perfectionnisme parental peut mettre en péril votre bien-être et celui de vos enfants. Pour favoriser un environnement familial plus sain et épanouissant :
- Définissez des attentes réalistes et atteignables.
- N’hésitez pas à encourager l’autonomie de vos enfants.
- Faites preuve d’indulgence envers vous-même.
Tâtonner, se questionner, faire des erreurs parfois, trouver des compromis… La vie de parent est faite d’adaptations perpétuelles. Gardez à l’esprit que vous faites du mieux que vous pouvez, en fonction de vos ressources du moment présent, dans le respect de vous-même et de votre enfant — et c’est le plus important.
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